🇪🇸 Jour 84 : Madrigalejo > Zalamea de la Serena

Après un solide petit déjeuner, je retrouve le propriétaire de l’Hostal à neuf heures précises, comme convenu la veille. Je pense avoir omis de dire qu’en arrivant il y a deux jours, il m’avait proposé de nettoyer mes vêtements étant donné que ma chambre ne comportait pas de machine à laver, contrairement à ce que la description sur Booking.com annonçait. Il me remet donc mon sac de linge bien propre, soigneusement plié tout en me confirmant que c’était « offert par la maison ». Dans un même élan de gentillesse, il m’offre un petit agenda aux couleurs de son établissement ainsi qu’un stylo-bille publicitaire. Il me propose ensuite de faire quelques photos souvenirs, ce que j’accepte bien volontiers. Il me conseille enfin un itinéraire alternatif à celui que je lui annonce, bien plus sûr selon lui, et quasiment sans dénivelé sur une bonne quinzaine de kilomètres : il suffit de suivre le canal, même si la route est a priori interdite à toute circulation. Tant de gentillesse me ravit, mais tant d’empressement m’étonne aussi un peu, car ça ne correspond pas à l’image que je m’étais faite du personnage… Je ne tarde pas à comprendre que toute cette bienveillance sert sans doute à faire pardonner qu’il a occasionné une petite brûlure – vraisemblablement de cigarette – sur mon maillot ! Je découvrirai plus tard, en soirée, que mes chaussettes fraîchement lavées sentent elles aussi la cigarette. Je ne lui en veux cependant aucunement, et je garderai malgré tout un bon souvenir de mon étape à Madrigalejo.

Je suis donc la fameuse route « interdite » le long du canal, et je ne tarde pas à croiser quelques véhicules qui n’ont rien d’officiel. La route semble être un raccourci assez prisé, et bien toléré : un véhicule au logo de la compagnie des eaux me dépasse sans manifester quoi que ce soit, et un peu plus tard, c’est une voiture de police que je croise, sans que ses occupants ne me prêtent la moindre attention. Je profite de la relative quiétude de cette route pour observer de nombreux oiseaux : verdiers, cigognes, hérons notamment. Un énorme aqueduc apparaît soudain, qui marque la fin de cet itinéraire « bis » tandis que la configuration de la route change avec quelques côtes que je franchis sans difficulté.

En fin d’avant-midi, et alors que les températures commencent à grimper sérieusement, je descends jusqu’à un très large barrage annonçant inévitablement le retour des montées. La route est assez désagréable, en raison des trop nombreux véhicules y roulant à grande vitesse. Je décide donc d’emprunter un chemin parallèle, fait de terre et de petits gravillons. Alors que la jonction vers la route principale approche, j’aperçois au loin un cycliste équipé de sacoches comme les miennes, et d’un petit drapeau. Comme ça fait un bon moment que je n’ai pas rencontré de cyclovoyageur, je décide d’aller à sa rencontre en forçant un peu l’allure pour ne pas le rater. Alors que j’arrive à sa hauteur, il m’adresse juste un petit signe de la main, et rien de plus. Je remarque à ce moment qu’il est trempé de sueur, alors que moi pas du tout. Je le dépasse avant d’arriver dans la ville de Campanario et je lui fais un nouveau signe amical de la main, sans pouvoir voir s’il y répond.

La ville en question arrive au bon moment : celui de manger. Mais même si de nombreux bars et restaurants sont présents à Campanario, ils sont pratiquement tous fermés… Ce n’est qu’à la sortie de la ville que j’aperçois un restaurant qui propose un « menú del día », soit exactement ce que je recherche. Je m’attable en terrasse (ombragée) et au moment de passer commande, je reconnais mon cycliste voyageur, attablé à quelques pas ! Il m’adresse alors un grand sourire, et se lève même pour engager la conversation. Je comprends alors que lorsque je l’ai croisé un peu plus tôt, il était sans doute en proie à un certain épuisement empêchant toute interaction sociale. Après une bonne cerveza et une ensalada de garbanzos (salade de pois chiches), la situation est tout autre. J’apprends alors qu’il fait un voyage de trois jours, mais qu’il pense être trop chargé et pas assez entraîné. Lorsque c’est mon tour de lui exposer mon voyage, il fait de grands yeux puis éclate de rire en levant les deux pouces, puis retourne à sa table alors que son plat principal est servi, en même temps que mon entrée. Au moment de quitter les lieux, il revient vers moi pour me souhaiter bonne chance pour la suite, ce que je lui souhaite également à mon tour.

J’arrive en fin de journée au seul hôtel disponible à des kilomètres à la ronde : en raison du long week-end de la fête nationale, tous les hébergements des environs ont en effet été pris d’assaut. L’accueil n’y est pas des plus agréables : on m’interdit en effet de placer mon vélo ailleurs que dans un coin de la terrasse, ce qui me contrarie beaucoup étant donné que l’hôtel est au carrefour de deux axes routiers relativement importants. J’essaie tant bien que mal de faire comprendre, avec mon espagnol ultrabasique, que je souhaiterais que mon vélo soit abrité au moins des regards, mais rien n’y fait.

Puis un retournement de situation inattendu se produit : voilà qu’arrive un nouveau client de l’hôtel, qui n’est autre que mon collègue cycliste de tout à l’heure… Il n’a pour sa part aucune difficulté à faire accepter que son vélo « dorme » dans sa chambre, puis s’étonne qu’aucune solution ne puisse être trouvée pour moi. Bien décidé à me venir en aide, il demande donc de s’adresser directement au patron de l’hôtel. En attendant l’arrivée de ce dernier, il m’offre un café, et une bière sans alcool, mais refuse catégoriquement que je lui rende la pareille… Lorsque le patron arrive, il plaide ma cause devant lui, bien calmement, puis vient vers moi en me disant « it’s okay »  (alors qu’il ne m’a parlé qu’en espagnol jusque là). Et en effet, le patron s’adresse directement à moi mais en parlant beaucoup trop rapidement. Il me fait alors comprendre par gestes que je peux déposer mon vélo (il pédale avec les mains) dans un coin de la salle de restaurant (qu’il me désigne avec le doigt, tout en mimant le chemin que le vélo devra prendre), à partir de 21 heures (il me montre 9 doigts puis tapote son poignet). Il conclut par un clin d’oeil, puis lève les deux pouces. Je souris et exprime ma vive gratitude, aussi bien au patron qu’à mon pote le cycliste qui me fait à son tour les mêmes gestes avant de disparaître dans sa chambre…

🚴‍♂️ distance

0 km (jour)
6002.62 km (total)

↗️ dénivelé positif

0 m (jour)
38759 m (total)

🏰💚 CAGNOTTE

+ 0
2915 € (total)
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